La Note blanche revient sur les ondes afin d'enrichir une nouvellle fois notre culture musicale ! En effet, la semaine dernière, nous avons parlé du courant qui relie le jazz au classique. Grâce à cette première partie, nous avons également eu la chance d'entendre des morceaux du mythique pianiste américain Dave Brubeck puis, des titres du contrebassiste Charles Mingus. En revanche, d'autres grandes figures s'imposent au "troisième courant" alliant le jazz et le classique : celle de George Gershwin, du Modern Jazz Quartet ou encore celle de Bill Evans. Pour revenir vers l'histoire de ce courant, le pianiste et compositeur George Russell est un élément essentiel car il inventa le "concept lydien chromatique d'organisation tonale" pendant les années 40. L'adjectif "lydien" se réfère à une gamme utilisée en Grèce antique qui est une variante exotique de nos gammes occidentales. Cependant, George Russell ne fut pas le seul à composer en mode lydien. D'autres grands compositeurs classiques s'en étaient servis avant lui comme Beethoven, Prokofiev et Ravel. Néanmoins, Russell fut l'un des premiers à l'utiliser dans le jazz. Il donna lieu par la suite à de nombreux morceaux et improvisateurs de jazz à l'atmosphère changeante et à l'esthétique minimaliste. En 1953, Russell publie un livre sur le concept lydien et ouvre ainsi la voie au jazz de John Coltrane, Miles Davis et bien d'autres encore qui marqueront les années 60. A l'inverse du be-bop, cette musique utilise un petit nombre de tonalités seulement et laisse une grande latitude aux improvisateurs. Parmi les admirateurs de George Russell, nous comptons notamment le compositeur de musique contemporaine japonais Toru Takemitsu, ce qui témoigne une fois encore de la frontière poreuse qui existe entre le jazz et la musique classique. L'un des héritiers de cette frontière est pour commencer l'émission, le compositeur américain George Gershwin. En grandissant dans les quartiers de New-York, Gershwin fut exposé à d'innombrables genres de musique. A travers sa famille, il était familié avec le style klezmer des juifs américains. De plus, il connaissait bien la musique afro-américaine, en particulier le jazz. Ce style étant considéré à l'époque comme étant exclusif aux "musiciens de race", la nature de la musique de Gershwin fut par conséquent étiquetée comme une simple imitation du genre. Il est incontestable que plusieurs de ses oeuvres telles que Rhapsody in blue et son rag Rialto Ripples emploient la tonalité "blues" et les rythmes syncopés du jazz. Enfin, Gershwin était un grand enthousiaste de la musique moderne française ainsi que de divers compositeurs comme Jerome Kern, Claude Debussy, Berg, Igor Stravinsky, Darius Milhaud et Arnold Schönberg dont Gershwin lui-même a peint le portrait en 1934. Sur le plan modal, le musicien aimait particulièrement la sonorité de la gamme pentatonique qui inspira la mélodie de I Got rythm. Le compositeur se spécialisait dans la composition de chansons du style de Tin Pan Alley et de Broadway mais il composa aussi des oeuvres de plus grande envergure. Celles-ci ont été accusées par des musiciens, tels que Leonard Bernstein, d'être simplement des almagations de courtes mélodies. Il est vrai que le fameux morceau Rhapsody in blue contient cinq thèmes pouvant être interchangés et même omis entièrement. Cependant, la structure représente tout de même une complexité supérieure à sa norme habituelle. De même, le motif d'ouverture pour An American in Paris, avec ses changements de registre et des larges intervalles, ce morceau a clairement été écrit à l'intention d'un instrument autre que la voix. En somme, la musique de Gershwin contient à la fois des éléments du modernisme classique et de la musique populaire américaine. Par exemple, sa Rhapsody empruntait également des éléments de Reflets dans l'eau et Pour le piano de Debussy...
Dès à présent chers auditeurs, tendez l'oreille vers l'univers orchestral classico-jazz de George Gershwin dans la Note Blanche !
