Avec l’affaire Camilla Kouchner, j’ai pas mal réfléchi à cette responsabilité – en tant que journaliste – de bien nommer. J’avais l’impression de retrouver une espèce d’euphémisation dans les médias, comme si on n’arrivait pas à la nommer, cette vérité. C’est plutôt clair, pourtant, ce qu’il s’est passé, et ce dont Camilla témoigne. Son beau-père, Olivier Duhamel, aurait violé son frère jumeau quand ils étaient adolescents. On lisait « abus sexuel », « acte incestueux », « faits incestueux » partout. Avant, dans ma tête, lorsqu'on parlait d'inceste, ça concernait des relations sexuelles consenties entre membres d'une même famille. Mais là, c'était différent. Ça m’a donc donné envie de creuser, et je suis tombée sur le podcast de Charlotte Pudlowski, qui a fait un travail incroyable sur la question.
Je ne sais pas comment les gens réagissent quand, concrètement, ils captent le phénomène, mais moi, ça m’a énormément troublé. Je suis tombée de putain de haut. Je ne sortais quasiment pas de chez moi, et je pensais qu’à ça. J’ai essayé de comprendre ce qui pesait sur notre réponse collective ; pourquoi on n’osait pas en parler en société ; et comment ça se passait dans le débat public. J’ai écouté beaucoup de témoignages de personnes qui en ont été victimes. J’ai cherché dans l’histoire et dans l’évolution du Code Civil, par rapport à la famille.
Cette première chronique, je ne pouvais pas la faire sur autre chose. Il est important qu’on conscientise ensemble ce qu’est l’inceste, qu’on lève la honte et que les personnes victimes puissent en parler. Ce n’était pas voulu, mais je reconnais peu ma voix. Je l’ai ensuite interprété par ma gorge qui était encore nouée, en révélant un phénomène qui était en train de se révéler à moi.
With the disclosure of the Camilla Kouchner’s case, I’ve reflected quite a lot about this responsibility – as journalist – to name appropriately. I’ve had the feeling that media were softening the issue, like if no one was able to name it, this truth. What happened into Camilla’s family was though pretty clear. Her stepfather, Olivier Duhamel, would have raped her twin when they were teenager. However, we could read everywhere terms such as “incestuous act”, “incestuous facts”, or “sexual abuse”. Before, in my mind, speaking about incest meant consent relationships between family members. Here, it was different. It made me want therefore to dig into the phenomenon. I came across the Charlotte Pudlowski’s podcast who made an incredible job about this subject.
I don’t know how people react when they understand what it is, truly, when we speak about incest. As far as I am concerned, it has widely affected me. I’ve fallen from a great height. I wasn’t going out anymore, I was only able to think about that and nothing else. I’ve tried to understand what constrains our collective response ; why we couldn’t dare speaking about it socially ; how the issue was addressed in public debate. I’ve listened to many testimonies of people who have been victims of incest. I’ve searched into history and into the evolution of Civil code, in regards to family.
I wasn’t able to do this first chronic about something else. It is substantial that we raise awareness all together, that we remove shame for people who have been victim, for them to talk about it. I didn’t mean to, but my voice is quite different from usual. I guess my throat was still tied up while I was revealing a phenomenon which, meantime, was revealing itself to me.
Si tu veux aller plus loin:
* Le podcast de la journaliste Charlotte Pudlowski, qui m’a donné envie de mettre en visibilité ce phénomène. C’est assez lourd émotionnellement, mais ça vaut clairement le coup d’y pencher son oreille
* Si jamais – je me donnerai un jour le courage – tu veux aller voir de l’autre côté du miroir, Alexandre Mognol a réalisé une série documentaire et a donné la parole aux agresseurs