-Ouverture: "De quoi est fait le messianisme qui caractérise le cinéma de Steven Spielberg ? De l’idée qu’une mission historique de l’Amérique s’imposerait de l’immanence de ses principes fondamentaux et que, d’une certaine façon, la place de l’Autre (extraterrestre ou espion soviétique) en serait radicalement déterminée. Ce n’est pas une des moindres qualités du "Pont des espions" que de compliquer cette équation, non pas pour la rendre caduque mais pour, par un effet de dépassement paradoxal, en confirmer la raison d’être.
En choisissant de défendre un espion soviétique, l’avocat incarné par Tom Hanks affirme une universalité qui fonde justement les principes d’une démocratie juridique : il faut que les garanties de l’Etat de droit s’appliquent aussi à celui qui en nierait les fondements. Pourtant, ici, la question de la culpabilité et de la manière d’appartenir au « bon camp » est complexifiée par la peinture d’un personnage d’espion russe qui, tout aussi éloigné qu’il est des grandes prescriptions démocratiques par l’idéologie à laquelle il est supposé adhérer, semble tenir à un solide socle éthique (rester en toutes circonstances un « homme debout »). Un socle éthique qui va, in fine, englober le héros. Et, par ailleurs, de la même façon, la monnaie d’échange n’est plus constituée par un seul Américain, équivalent de son négatif soviétique, mais par deux (le pilote de l’avion espion et l’étudiant arrêté à Berlin, personnage à peine esquissé qui seul peut se prévaloir d’une innocence complète, primitive et enfantine), comme si l'unité initiale s'était perdue au contact des réalités de l'Histoire..
Progressivement, ce n’est plus simplement la manière d’adhérer aux principes fondamentaux de la Constitution qui va définir les qualités du héros mais son habileté rhétorique et sa ruse dialectique, qualités aux termes desquelles une sorte de bon sens pragmatique, aux bornes du cynisme, se substitue à l’impératif de la Loi fondamentale. On passe ainsi de l’idéalisme à un mode concret de rapports de forces en action. De Frank Capra à John Ford. De mieux en mieux donc". Jean-François Rauger sur Le Pont des espions (Spielberg). Statut facebook du 02/12/15.
-Le Pont des espions (Spielberg) (7.9/10) (Rédaction)
-Mia Madre (Moretti) (3.5/10) (Erwan)
-Le Voyage d'Arlo (Sohn) (6.5/10) (Thomas)
-Les coups de coeur de la semaine:
-Erwan: revoir Body Double (De Palma). On chroniquera la nouvelle édition du film par Carlotta la semaine prochaine.
-Thibaut: Les Fils de l'homme (Cuaron)
-Thomas: Le Jour du vin et des roses (Edwards) et revoir Open Range (Costner)